La crise sanitaire provoquée par la pandémie mondiale de Coronavirus bouleverse nos vies depuis maintenant quinze mois. Nous espérons tous que le retour à une situation maîtrisée (pour ne pas dire encore normale) est en vue. Face aux conséquences multiples (sanitaires, sociales, sociétales, économiques, environnementales, ...) de cette menace, la CFDT estime nécessaire de mettre à profit l'expérience vécue et préparer ainsi le "monde d'après". Cette période délicate a touché nos vies, freiné nos libertés mais a aussi joué un rôle de catalyseur sur un certain nombre de domaines dont le mode du travail. Notre secteur n'a certes pas été épargné mais a su préserver une activité durable  par notre faculté de s'adapter à un travail distant. Le télétravail a véritablement explosé, envahi notre quotidien, bousculé nos habitudes.

Peu répandu dans notre Entreprise en raison d'un retard historique de nos dirigeants à intégrer sans crainte cette notion, il était encore embryonnaire et en phase de test en 2019, suite à la publication d'une charte interne sur le télétravail, venant pallier l'échec des négociations pourtant bien avancées avec les syndicats sur un accord. La CFDT milite depuis de longues années pour projeter notre entreprise dans un cadre moderne et agile. Cette dynamique absente jusqu'à présent, commence à poindre sous l'effet de nouvelles orientations stratégiques soutenues par des idées neuves. Nous espérons que la volonté de réformes se traduira en actes et que le dialogue social s'en trouvera renforcé. C'est dans ce cadre que la CFDT estimait ce thème prioritaire pour les négociations de cette année 2021.  La Direction a entendu notre souhait de ré-ouvrir les négociations, consciente que ce sujet relève d'une forte demande des salariés et d'un enjeu important de positionnement par rapport à une concurrence forte dans ce contexte de reprise économique.

Les partenaires sociaux se sont emparés de ce sujet sous l'impulsion du gouvernement avec pour objectif de déployer dans un délai contraint un accord national interprofessionnel (ANI) intitulé "pour une mise en oeuvre réussie du télétravail". Délivré en décembre 2020, son intitulé est révélateur de son contenu : il se veut un guide structurant répertoriant d'une part les enseignements de la crise Covid et d'autre part identifiant les enjeux et questions autour du télétravail. Il n'apparaît donc que comme une check-list de points de vigilance que la CFDT a validé comme d'autres syndicats. La mise en oeuvre concrète, les processus de déploiement et de suivi, les instruments de suivi, les moyens dédiés sont propres au secteur professionnel et à l'Entreprise. Notre branche professionnelle s'est emparée aussi du sujet mais devant la lenteur des discussions avec les syndicats patronaux, la CFDT a pris les devants en proposant un projet d'accord de branche, demeurant encore hélas à l'état de projet. C'est dans cette situation que le début du dialogue dans l'Entreprise s'est opérée en cette fin avril 2021. Pour la CFDT, point n'est besoin de reprendre les choses à leur début, nous devons réinitialiser nos discussions sur la base du projet d'accord de l'époque, très proche de la Charte unilatérale déployée en septembre 2019.

La CFDT a demandé en premier lieu lors de la reprise des échanges si notre Direction escomptait établir une enquête auprès des salariés afin d'établir un diagnostic partagé sur la pratique intensive du télétravail pendant la longue période d'état d'urgence sanitaire que nous vivons. Il est en effet regrettable que rien n'ait été initié sur ce sujet depuis mars 2020, nous avons en effet affaire à une vaste expérimentation à grande échelle dont le retour d'expérience est très utile. Las, la réponse est négative et donc ce sont les syndicats qui vous interrogent sur ce sujet où nous avons besoin de vos réflexions, votre vécu, vos attentes, merci de répondre à notre enquête ! Quelques jours après ces réunions, nous apprenons toutefois par la presse (source : La Tribune) qu'une enquête effectuée par AUSY révèle qu'un ingénieur sur deux serait prêt à refuser un poste si l'employeur ne propose pas le  télétravail. L'article indique ainsi "Alors qu'ils travaillaient déjà avec des outils numériques, sans être forcément au contact du client, les ingénieurs, notamment en informatique, ont très vite pris goût au télétravail. A l'avenir, plus de la moitié d'entre eux (55%) souhaitent télétravailler plusieurs jours par semaine, et 5% veulent le faire à temps plein, révèle une étude Infopro Digital pour Ausy, filiale de Randstad. Parfois même, le télétravail est devenu une condition non-négociable : 49% des ingénieurs sont prêts à refuser un poste si l'entreprise ne propose pas cette possibilité, selon cette étude réalisée en avril." Le sujet du télétravail est donc en passe d'être un discriminant social dans le champ des entreprises, résultat d'une pratique intensive qui dans la majorité des cas a été accueillie positivement par les salariés, et souhaitent donc poursuivre cette expérience pour partie de leur temps de travail et selon un rythme à définir, régulier ou pas, occasionnel ou non. Bien sûr, rappelons que ce mode de travail ne résulte que d'un volontariat commun entre le salarié et l'employeur pour être effectif. Mais la volonté du salarié est présente, l'employeur devra être conscient du risque qu'un refus augmente la volatilité de son personnel...

La CFDT a aussi identifié les points prioritaires suivants à introduire ou améliorer dans le projet actuel :

  • Catégoriser les différents mode de télétravail (régulier, occasionnel, en situation de crise) et décrire les processus de mise en place et de suivi pour chacun d'eux
  • Anticiper les scénarii exceptionnels amenant l'entreprise à recourir (de façon contrainte ou non) au télétravail en situation de crise (épidémie, grève, pic de pollution, intempéries) par la présence un plan de continuation d'activité dont le contenu se doit d'être tenu à jour
  • Inscrire  le sujet du télétravail dans les discussions dès l'embauche du salarié dans une relation gagnant - gagnant : équilibre de vie vs. attractivité de l'Entreprise.
  • Libérer la fréquence du télétravail non plus plafonné à 2 ou 3 jours par semaine mais possiblement à 4 ou 5 jours, ne plus appliquer de dogmatisme en la matière et discuter de la fréquence en concertation salarié - employeur
  • Prêter une attention particulière au management à distance et prévoir des formations régulières sur le sujet.
  • Renforcer le montant de l'indemnité journalière et prévoir une participation de l'employeur à l'achat de matériel par le salarié dans le cadre de l'aménagement de son poste de télétravail (siège ergonomique, écran supplémentaire, etc...)
  • Mener un chantier sur les outils informatiques pour permettre de formaliser avec souplesse la déclaration de télétravail et aussi d'en extraire un retour d'expérience par le suivi

S'agissant des moyens financiers, qui peut vite devenir un sujet de blocage en ces temps délicats, la Direction propose pour l'heure 1€ par jour télétravaillé (doublée donc par rapport au montant actuel) en compensation de l'utilisation du domicile (abonnement internet, électricité, chauffage,..) et réfléchit à la possibilité d'une participation aux achats de matériels du salarié sur catalogue d'un fournisseur partenaire. Même si cela est encore insuffisant et imprécis, la CFDT note que les lignes bougent, signe d'un sujet digne d'intérêt pour l'Employeur...